Faut il faire des radiographies systématiques avant manipulation
?
Recommandations de la SOFMMOOM |
NB : Ce travail a été publié dans les Annales de
Médecine Physique (2007;50:111-6)
On peut prendre
connaissance du
résumé sur PubMed
La question de la
nécessité de radiographies systématiques avant manipulation, en particulier
vertébrale, a fait l'objet d'une session des 16èmes Actualités Médicales du
Rachis (juin 2003), session organisée par la SOFMMOOM. Les praticiens de Médecine
Manuelle sont en effet dans une situation floue, comme en témoignent leurs
réactions sur ce site avant la tenue de cette Table Ronde (voir le
programme et consulter les présentations en ligne).
D'un côté, les
traités classiques de Médecine Manuelle n'abordent pas directement cette
question. D'autre part, l'ensemble des recommandations internationales
("guidelines") insistent avec force sur l'inutilité des radiographies
systématiques, celles ci n'étant indiquées qu'en cas de présence de signes
d'alerte ("red flags"). Ces signes sont cliniques et sont rappelés dans
l'encadré I. Leur recherche doit être conduite avec rigueur et constitue un
véritable acte médical. Les recommandations qui découlent de leur présence
s'appuient sur le concept de médecine fondée sur des preuves et sont justifiées
par le fait que les radiographies coûtent cher, que l'irradiation subie par le
patient n'est pas négligeable et que la mise en évidence d'anomalies non ou peu
significatives pourrait avoir une influence négative sur la façon dont il
perçoit sa douleur en favorisant le passage à la chronicité. Notons dès
maintenant qu'il s'agit pour ces recommandations de radiographies à visée
diagnostique et non pas de radiographies destinées à évaluer un risque
manipulatif (mais nous verrons que ces deux concepts se recouvrent) et qu'elles
sont destinées à la pathologie lombaire, le cas du rachis cervical n'étant pas
directement évoqué.
Fracture :
traumatisme majeur (chute, AVP) ou traumatisme mineur (soulèvement de
lourde charge) chez un sujet âgé ou potentiellement ostéoporotique,
douleur thoracique (selon les guidelines)
Tumeur ou infection : sujet de moins de 20 ans ou plus
de 50 ans (ou 55 ans, selon les guidelines), antécédents de cancer,
fièvre récente, frissons, amaigrissement inexpliqué, récente infection
bactérienne, immuno-dépression, drogues IV, douleur nocturne sévère,
douleur s'aggravant en décubitus, douleur thoracique (selon les
guidelines)
Syndrome de la queue de cheval : anesthésie en selle,
survenue récente d'un dysfonctionnement vésical, déficit neurologique
des membres inférieurs d'apparition progressive ou sévère.
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Sources :
Guidelines britanniques et
Guidelines américains |
Note : la
chronicité de la douleur (évolution depuis plus de 3 mois) est pour
l'ANAES une indication à la pratique des radiographies standard |
D'un autre côté,
l'ANAES, dans ses recommandations sur l'imagerie de la lombalgie, écrit que "En
dehors de la recherche d'une lombalgie symptomatique, il n'y a pas lieu de
demander d'examen d'imagerie dans les sept premières semaines d'évolution, sauf
quand les modalités du traitement choisi (comme manipulation et infiltration)
exigent d'éliminer formellement toute lombalgie spécifique". De plus, la
jurisprudence fait constamment apparaître qu'en cas de complication post
manipulative, l'absence de radiographie est considérée par l'expert judiciaire
comme une marque d'absence de soins compétents (circonstance aggravante), même
s'il est patent que la pratique de radiographies préalables n'aurait en aucun
cas pu prévenir la survenue de la complication en cause.
Dans ce contexte,
deux positions sont possibles. La première est que l'interrogatoire et l'examen
clinique bien conduits sont suffisants pour éveiller l'attention du praticien et
lui indiquer quand il faut faire une radiographie (ou tout autre examen
d'imagerie) et quand il est inutile d'en faire une. Les avantages sont liés à
l'économie du coût des radiographies, à l'irradiation épargnée aux patients et à
l'absence des conséquences négatives que pourraient avoir la découverte
d'anomalies minimes. La seconde est à l'opposé : les radiographies systématiques
permettent de faire le diagnostic d'affections dépourvues de symptômes et de
signes cliniques spécifiques, donc se confondant avec une douleur commune, mais
suffisamment évoluées et graves pour fragiliser la vertèbre ou le névraxe au
point qu'une manipulation pourrait entraîner une grave complication. Elles
permettraient également, règle non écrite, mais bien présente à l'esprit, de se
garantir du point de vue médico-légal, pour la raison évoquée plus haut.
Une réflexion
s'imposait donc sur ce thème. La démarche suivie par la SOFMMOOM a été la
suivante : les cinq communications faites aux 16èmes AMR ainsi que les divers
commentaires des membres de notre société ont constitué le point de départ de
cette réflexion. Des discussions s'en sont suivies. Le texte que l'on va lire a
été rédigé par J.Y. Maigne, initiateur de cette démarche, et a été relu et
amendé par les Drs G. Berlinson, F. Dumont, J.C. Goussard, M. Marty et P.
Vautravers. Les régions lombaires, thoraciques et cervicales ont été envisagées
séparément en examinant les différentes complications possibles des
manipulations vertébrales et en cherchant pour chacune quel pouvait être
l'apport préventif de la radiographie standard. Notre définition de la
manipulation est celle de R. Maigne : "manoeuvre unique, brève et sèche qui
porte un segment mobile au delà de son jeu habituel tout en restant dans les
limites anatomiques. Elle s'accompagne en général d'un bruit de craquement."
Cette définition exclue donc les techniques de mobilisations, les étirements,
les tractions, les massages et les techniques myotensives (contracter relâcher).
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Rachis
lombaire et région sacro-iliaque
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Syndrome de la queue
de cheval
-
Syndrome de la queue de cheval par manipulation d'une hernie discale
Le syndrome de la queue de cheval est la complication la plus grave des
manipulations lombaires. Une publication américaine de 1992 a recensé et
étudié 29 cas rapportés dans la littérature depuis 1911 (Haldeman). Il
s'agissait pour 28 d'entre eux de sciatiques par hernie discale. Parmi eux,
seize patients avaient été manipulés sous anesthésie générale. Le mécanisme
pourrait être une brusque augmentation de volume de la hernie ou une
interruption du flux sanguin destiné au cône terminal (Balblanc).
Deux remarques s'imposent. Les manipulations sous anesthésie générale n'ont
jamais été pratiquées en France (et sont à notre connaissance abandonnées)
et sont une technique risquée (absence de réaction du patient). La
radiographie est un examen inutile pour le diagnostic de hernie discale et
n'aurait pu donc, à elle seule, éviter ces complications.
-
Syndrome de la queue de cheval par manipulation d'une sténose lombaire
Dans le travail évoqué ci dessus, le 29ème cas concernait un patient atteint
de nanisme achondroplasique et se plaignant d'une sciatalgie. Le canal
étroit étendu est une constante du rachis achondroplasique, condition
contre-indiquant les manipulations. Lorsque la sténose est localisée, aucun
accident n'a été décrit dans la littérature. Cependant, en l'absence de
toute étude disponible, les symptômes du canal étroit ne semblent pas
représenter une bonne indication aux manipulations.
-
Syndrome de la queue de cheval par tassement d'une vertèbre tumorale
Dupeyron et al ont rapporté récemment, dans le cadre d'une étude plus large,
quatre cas de syndrome de la queue de cheval dont deux paraissent liés au
tassement d'une vertèbre tumorale ou à une épidurite. S'agissant d'une étude
rétrospective, aucun renseignement clinique n'est disponible, en particulier
sur les symptômes qui avaient motivé la consultation. Deux publications font
état de manipulations pratiquées de façon fautive sur des rachis cancéreux.
Dans la première, il s'agissait d'une patiente en cours de chimiothérapie
pour un lymphome, manipulée au niveau de ses articulations sacro-iliaques.
La conséquence en a été un tassement lombaire sans atteinte neurologique
(Maigne). Dans la seconde, il n'y eu aucune complication et les patients
furent même paradoxalement soulagés de façon temporaire. Les auteurs en
tirent argument pour un effet antalgique des manipulations, qui expliquerait
partiellement leur action dans les douleurs communes (Vautravers). En
revanche, nous n'avons trouvé aucune publication (en dehors de celle de
Dupeyron et al) rapportant un syndrome de la queue de cheval après
manipulation d'une vertèbre tumorale.
La question posée est donc : peut on imaginer une affection maligne
suffisamment évoluée pour fragiliser une vertèbre au point qu'une
manipulation puisse la tasser, sans qu'il n'y ait aucun signe clinique
d'alarme ? L'absence de tout cas publié sur ce sujet (alors que les
publications sur les complications des manipulations sont extrêmement
nombreuses) incite à une réponse négative.
-
Syndrome de la queue de cheval par tassement ostéoporotique
L'ostéoporose est une affection asymptomatique qui, lorsqu'elle est évoluée,
peut se compliquer de tassement corporéal. Il était classique de dire que
ces tassements ne s'accompagnaient jamais de complications neurologiques,
mais quelques cas ont été décrits récemment (Benoist). Aucun cas post
manipulatif ne figure parmi eux à ce jour. De plus, l'âge supérieur à 50 ans
et l'ostéoporose "potentielle" (post cortisonique par exemple) font partie
des indications de radiographie systématique, d'après les "guidelines".
La radiographie n'est pas considérée comme un examen utile au diagnostic
d'ostéoporose en raison de son absence de fiabilité. L'ostéodensitométrie
est l'examen de référence.
-
Syndrome de la queue de cheval par tassement lié à une tumeur bénigne
Les tumeurs bénignes du rachis sont rares et surviennent pour la plupart
dans un contexte particulier. L'ostéochondrome et le granulome éosinophile
se voient chez l'enfant de moins de dix ans. Les tumeurs à cellules géantes,
l'ostéome ostéoïde et l'ostéoblastome ne se compliquent pas de fractures. En
revanche, l'angiome actif compliqué et le kyste anévrismal osseux sont une
cause possible de tassement avec compression radiculaire ou médullaire. Le
premier est surtout à localisation thoracique et sera envisagé au chapitre
suivant. Le second est à l'origine de rachialgies mécaniques et survient
chez l'enfant ou l'adulte jeune (de 5 à 25 ans). Il peut toucher avec une
égale fréquence n'importe quel segment de la colonne et se manifeste par des
rachialgies mécaniques et, dans environ 10% des cas, par une fracture
pouvant s'accompagner de paraplégie (Papagelopoulos). Un contexte de
douleurs chez un sujet jeune doit pousser à demander des radiographies,
conformément aux recommandations des "guidelines" (sujets de moins de 20
ans). Le cas des sujets de 20 à 25 ans n'est pas pris en compte par les
"guidelines". La présence d'un kyste anévrismal osseux vertébral à cet âge,
mimant une douleur commune récente est probablement une éventualité tout à
fait exceptionnelle. Néanmoins, il paraît sage de proposer de principe une
radiographie aux sujets de cet âge afin de limiter le risque lié à une
manipulation. Nous proposons donc d'étendre à 25 ans la nécessité d'une
radiographie systématique prévue par les "guidelines", lorsqu'une
manipulation est prévue.
Fracture
vertébrale simple
Un tassement
vertébral non compliqué secondaire à une manipulation est théoriquement
possible, en particulier dans le cadre d'une ostéoporose, bien qu'aucune
observation de la littérature n'est disponible. On peut aussi imaginer le cas
d'une patiente souffrant d'un tassement récent et douloureux (spontané ou après
un accident de la voie publique par exemple), se faisant manipuler avec un
diagnostic de lombalgie aiguë bénigne et voyant son tassement aggravé. Il existe
une règle clinique interdisant de manipuler une lombalgie récente d'apparition
brutale (post traumatique ou non) sans radio préalable, a fortiori chez une
femme exposée par l'âge au risque d'ostéoporose. Cette règle de bonne pratique
clinique semble suffisante.
Cas du
spondylolisthésis par lyse isthmique
Un
spondylolisthésis (SPL) par lyse isthmique peut il être aggravé (cliniquement ou
anatomiquement) par une manipulation inappropriée ? Il est difficile de répondre
à cette question du fait d'un manque de données dans la littérature. Elle est
pourtant importante, car le SPL ne peut être dépisté que par la radiographie
lombaire (en dehors des rares cas où le décalages des épineuses est probant). On
peut distinguer trois cas : la constitution de la lyse, le SPL de grade faible
et le SPL de grade II et au delà.
- Lors
de la constitution de la lyse
La lyse isthmique, lorsqu'elle donne lieu à des manifestations cliniques, ne
peut être manquée, puisqu'elle est à l'origine d'une douleur d'apparition
relativement brutale ou rapide, chez un adolescent souvent à la suite d'un
geste sportif en extension lombaire marquée. Un tel tableau est évocateur et
suffit à faire demander des radiographies. On doit garder à l'esprit
l'histoire médiatisée de cette jeune sportive mineure qui s'était plainte,
au cours de son entraînement, de douleurs lombaires d'apparition brusque.
Son entraîneur l'avait plus ou moins forcée à poursuivre. Les douleurs
s'étaient aggravées, étaient devenues chroniques et la famille avait porté
plainte. Il n'y avait pas eu de manipulation vertébrale, mais on peut
imaginer une similitude de situation. Toute douleur un tant soit peu durable
chez le sujet jeune est un signe d'alerte reconnu par les "guidelines", qui
doit conduire à la radiographie.
- SPL
de grade faible
Il n'existe aucune aucune observation publiée, à notre connaissance, d'une
aggravation anatomique ou clinique d'un SPL suite à une manipulation, ni
aucune règle écrite sur ce sujet. L'expérience personnelle de nombreux
manipulateurs va à l'inverse, puisque des patients porteurs de SPL de grade
faible ont pu être traités avec de bons résultats par manipulation lombaire
(Young). Ces patients souffraient pour la plupart de douleurs lombaires
chroniques et étaient donc porteurs de radiographies (les recommandations
internationales stipulant de faire des radios au delà de deux mois
d'évolution).
- SPL
de grade II et au delà
Les SPL de garde II et plus peuvent être à l'origine de douleurs chroniques
lombaires ou sciatiques. Si la manipulation ne paraît pas, a priori, un
traitement logique, il faut garder à l'esprit qu'il n'existe, à notre
connaissance, pas de cas publié d'aggravation durable d'un spondylolisthésis
après manipulation. Le mécanisme de la douleur est complexe : les
manipulations lombaires peuvent avoir un effet sur la contracture musculaire
et la douleur lombaire basse peut aussi provenir de la charnière
thoraco-lombaire, région facilement manipulable.
Aggravation d'une douleur lombaire ou d'une sciatique après manipulation en
dehors de toute lésion radiologique significative
L'aggravation
d'une douleur lombaire ou d'une sciatique en l'absence de toute lésion
radiologique significative (sinon une discarthrose dont on connaît l'absence de
corrélation avec la clinique ou une maladie de Scheurman discrète et ancienne)
est possible après manipulation. L'aggravation est en règle de brève durée (quelques
jours) avant le retour à l'état antérieur, mais elle peut dans certains cas
exceptionnels, persister voire donner lieu à des suites judiciaires. Quel que
soit le mécanisme en cause, l'absence de lésion osseuse visible (ou leur
caractère banal) rend rétrospectivement sans intérêt les radiographies. La
prévention de telles situations déborde de notre sujet, mais on ne peut
qu'insister sur l'importance de l'écoute du patient et de la compréhension de ce
qu'il attend de la consultation. Certains patients ne souhaitent pas être
manipulés et le médecin doit accepter cette situation. Surtout, il doit arriver
à un diagnostic aussi précis que possible sur l'origine anatomique de la source
principale de la douleur et des facteurs contribuant à sa chronicité (disque,
articulaires postérieures, dysfonctionnement des voies de la douleurs,
intrications médico-légales...) et ne réserver les manipulations qu'aux cas de
douleurs strictement mécaniques, sans composante inflammatoire. Cette démarche
diagnostique repose avant tout sur l'interrogatoire et l'examen clinique. Les
radios peuvent être utiles, mais pas de façon systématique. Ici aussi, les
recommandations des "guidelines" semblent suffisantes (radios systématiques en
cas de douleur chronique), en étant conscient de l'insuffisance des radios à
prévenir ce type de situation.
On peut y ajouter
que dans certains cas, la pratique de radiographies, même si elle n'est pas
justifiée médicalement, peut être utile lorsque le patient semble y tenir de
façon marquée. Faire des radiographies (en dehors des recommandations des
"guidelines") pourrait alors rassurer le patient, conforter la relation
médecin-malade et participer à la prévention de ce type de situation. Ce cas
n'est pas envisagé par les "guidelines" mais correspond bien à une réalité.
Conclusions pour le rachis lombaire
Toutes les
situations à risque vertébral après manipulation lombaire semblent prises en
compte dans les "guidelines" qui constituent donc une référence suffisante pour
le médecin. La première exception est le sujet entre 20 et 25 ans, où un kyste
anévrismal osseux est théoriquement possible. Le risque représenté par des
manipulations justifie la pratique de radiographies systématiques dans cette
tranche d'âge. La seconde exception est le désir anxieux et pressant du patient
de bénéficier de clichés en dehors des indications classiques. Si des
manipulations sont prévues, il nous semble sage d'accéder à ce souihait pour le
tranquilliser sur l'état de sa colonne.
La pratique systématique de radiographies avant manipulation lombaire ne repose
pas sur des preuves cliniques et n'est donc pas de mise.
Compression
radiculo-médullaire
Les complications
observées après manipulation du rachis thoracique sont de même nature que celles
évoquées ci dessus pour le rachis lombaire. Il n'y a pas syndrome de la queue de
cheval mais compression médullaire. Le seul cas différent est celui de l'angiome
actif compliqué, dont la localisation est préférentiellement thoracique (dans
86% des cas). Il est plus fréquent chez la femme, en particulier lors d'une
grossesse, se révélant soit par des rachialgies, soit par une compression
radiculo-médulaire de survenue rapide, post traumatique ou spontané (fracture ou
hématome épidural) (Castel). L'IRM est l'examen de choix.
La survenue d'une douleur de localisation thoracique représente, pour les
"guidelines" en particulier britanniques, un signe d'alerte nécessitant une
radiographie. Cette recommandation n'est pas présente dans d'autres
"guidelines". La SOFMMOOM recommande de ne pratiquer des radiographies qu'en cas
de signes d'alerte ou de chronicité. En cas de doute chez la femme enceinte, un
traitement médicamenteux est préférable à la manipulation, avant de décider
d'une IRM.
Tassement
ostéoporotique
Les mêmes
remarques que celles faites pour le rachis lombaire peuvent être faites ici.
Nous n’y reviendrons pas.
Fracture
de côte
Une fracture de
côte est excceptionnellement possible lors de certaines techniques manipulatives
prenant appui sur le plastron sterno-costal. Ce risque existe chez toute
personne âgée et doit conduire à la prudence lors de la réalisation de ces
manœuvres. La radiographie ne peut remplacer cette nécessaire prudence.
Dissection
vertébrale
La dissection de
l'artère vertébrale est la complication la plus sérieuse des manipulations. Elle
est imprévisible dans l'état actuel de nos connaissances et personne ne discute
l'absence d'intérêt de la radiographie. Si le Doppler semble une voie de
recherche intéressante (Haynes), sa pratique systématique n'a à ce jour reçu
aucune validation. La seule prévention possible est de se plier aux
recommandations de la SOFMMOO qui déconseille la pratique de manipulations en
rotation chez la femme de moins de 50 ans.
Aggravation d'une fracture ou d'une entorse cervicale
Les fractures ou
entorses cervicales graves peuvent survenir après un traumatisme en général
assez violent, mais parfois modeste, en particulier chez le sujet âgé (fracture
de l'odontoïde, susceptible de se déplacer secondairement) ou ostéoporotique. La
règle absolue est d'obtenir des radiographies après tout traumatisme cervical
suivi de douleurs non régressives. Il faut pouvoir visualiser l'odontoïde chez
le sujet âgé, et disposer de radiographies dynamiques en flexion extension (à
réaliser huit jours après l'accident) pour dépister une entorse grave avec
instabilité. Deux publications récentes rappellent cette nécessité (Brynin,
Crowther).
Aggravation d'une radiculalgie ou d'une cervicalgie
Comme pour la
lombalgie et la sciatique, une cervicalgie ou une névralgie cervico-brachiale
peut être passagèrement aggravée par une manipulation dont l'indication a été
mal posée, avec retour rapide à l'état antérieur. Exceptionnellement et dans
certaines circonstances cliniques particulières, cette aggravation peut s'avérer
durable, mettant en cause la responsabilité du médecin. La présence d'un état
arthrosique du rachis cervical, d'une sténose serrée des foramen intervertébraux
peuvent constituer des contre-indications relatives aux manipulations. Le rachis
cervical étant, a priori, plus fragile que le rachis lombaire, la pratique de
radiographies systématiques avant manipulation paraît devoir être recommandée.
Cas
particulier des malformations de charnière cranio-cervicale
Les malformations
de charnière cranio-cervicale peuvent être osseuses (impression basilaire, bloc
vertébral), nerveuses (Arnold-Chiari) ou mixtes. Des radiographies normales
n'excluent en aucun cas une malformation nerveuse et le diagnostic repose sur
l'IRM. La conséquence la plus classique de la malformation d'Arnold-Chiari est
la syringomyélie, dont la manifestation clinique est souvent une vague névralgie
cervico-brachiale (avec inversion du réflexe tricipital). Malgré l'absence de
parallélisme radio-clinique, et l'absence de données de la littérature, la
possibilité de malformations osseuses sont une raison de demander des
radiographies avant manipulation.
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Les recommandations de la SOFMMOOM
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L'examen de
l'ensemble des complications possibles des manipulations et la discussion de
l'intérêt préventif de radiographies préalables pour chacune d'elles montrent
que les recommandations des "guidelines" sont globalement suffisantes pour
assurer la sécurité de l'acte manipulatif aux étages lombaires et thoraciques.
La seule exception est le sujet âgé de 20 à 25 ans, où un kyste anévrismal
osseux est encore théoriquement possible.
En ce qui
concerne le rachis cervical, une attention particulière doit être portée aux
malformations de charnière cranio-cervicale, qui ne peuvent être dépistées
cliniquement, ainsi qu'à la présence d'une arthrose évoluée. La manipulation de
telles lésions n'est peut être pas dépourvue de tout risque malgré l'absence de
données dans la littérature. C'est pourquoi la SOFMMOOM recommande des
radiographies systématiques du rachis cervical. Un centrage face profil sur
l'odontoïde est nécessaire en cas de céphalées supposées d'origine cervicale ou
de cervicalgie haute lorsqu'un traitement par manipulation parait indiqué, même
si les troubles ne sont pas chroniques.
Enfin, ces
recommandations ne sont pas définitives. Elles s'appuient sur l'état actuel des
connaissances épidémiologiques et peuvent être modifiées ultérieurement.
Ces
recommandations s'énoncent comme telles :
Première recommandation : pour toute manipulation des
articulations sacro-iliaques, du rachis lombaire et du rachis thoracique, il
n'y a pas lieu de demander systématiquement une radiographie. Le médecin
devra se conformer aux directives admises internationalement ("guidelines")
qui recommandent une radiographie en cas de douleur chronique (plus de deux
à trois mois d'évolution) ou lorsque des signes d'alerte sont présents ou
chez les sujets de moins de 20 ans et de plus de 50 à 55 ans. La SOFMMOOM
propose de faire passer de 20 à 25 ans l'âge jusqu'au quel des
radiographies systématiques sont encore nécessaires.
Deuxième recommandation : pour toute manipulation du
rachis cervical, des radiographies avant manipulation sont indispensables,
quelle que soit l'ancienneté de la douleur.
Troisième recommandation : lorsque le
patient souhaite de façon insistante une radiographie qui
n'apparaît pas, par ailleurs, médicalement justifiée, et qu'un traitement
manipulatif est indiqué, cette radiographie doit être réalisée. Cette
recommandation est liée au caractère très particulier du geste manipulatif
et de la nécessaire pleine coopération du patient.
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