Rev Rhum 1967;34:636-41
A propos du
mécanisme de la douleur
dans les dorsalgies dites "des couturières"
Le point interscapulo-vertébral
R Maigne
|
Résumé. L'auteur note la très
grande fréquence de l'existence d'un point algique particulier dans les
dorsalgies bénignes de l'adulte. Ce Point est remarquable par sa constance
(80 % des cas), sa fixité para D5 ou D6, à deux travers de doigt de la ligne
médiane. La pression exercée sur lui reproduit
exactement la douleur spontanée. du patient, même lorsque celui ci la
ressent plus diffuse ou plus latérale. Dans le présent travail, la nature de
ce Point est discutée des arguments anatomiques, cliniques et
électromyographiques permettent de penser qu'il correspond à l'émergence
superficielle de la branche postérieure du 2° nerf rachidien. Il est noté
que dans 22 cas de dorsalgies rebelles aux thérapeutiques physiques ou
récidivantes, 17 cas présentaient électromyographiquement des signes
caractérisés d'irritabilité neuro-musculaire (spasmophilie).
Lors d'une
précédente communication faite ici même, nous avons présenté un travail
consacré aux dorsalgies communes. Nous avions mis l'accent sur leur origine
cervicale fréquente. Nous avons montré qu'une manoeuvre cervicale, la
manoeuvre du « Point sonnette cervical antérieur » permet fréquemment de
reproduire ou d'augmenter la douleur dorsale habituelle (fig. 1).
Nous avions
également mis l'accent sur un signe particulier dont la constance nous avait
frappé : l'existence d'un point douloureux à la pression, le « Point
interscapulo-vertébral » toujours situé au même endroit, et toujours
identique à lui même. Il est constant dans les formes où l'origine cervicale
peut être affirmée par la manoeuvre du point sonnette ; mais il existe très
fréquemment dans des cas apparemment identiques, où la recherche la plus
attentive ne permet pas de retrouver un point sonnette cervical.
Enfin, comme
l'ont noté tous les auteurs, la dorsalgie chronique évolue souvent sur un
terrain particulier ou survient à l'occasion d'épisodes psychiques. Une
vingtaine d'observations de dorsalgies interscapulaires particulièrement
récidivantes ou rebelles nous ont conduit à pratiquer des examens
électromyographiques dont nous donnerons les résultats.
I) Le point interscapulo-vertébral
1) Situation
Il est
unilatéral, rarement bilatéral et est remarquablement fixe dans sa
topographie chez tous les patients et à tous les examens. Il est situé à 3
centimètres environ de la ligne médiane en regard de D5, plus rarement de D6
(fig. 2).
Sa disparition
au cours d'un traitement signe la disparition de la dorsalgie. Chez le
dorsalgique chronique, il existe en dehors des périodes douloureuses.
Fig. 1. Le point sonnette cervical antérieur. Une pression
modérée est exercée étage par étage à la partie antéro-latérale et
inférieure du rachis cervical. A un certain niveau, elle déclenche la
dorsalgie habituelle du patient. Ce signe est présent dans plus de la moitié
des dorsalgies habituelles qui reconnaissent ainsi une origine cervicale.
Fig. 2. Le Point interscapulovertébral. Présent dans 80 %
des dorsalgies bénignes ; sa topographie est pratiquement constante, para-D5
le plus souvent, plus rarement para-D4 ou D6. La pression sur lui reproduit
la douleur habituelle même si le patient la ressent plus externe, plus
diffuse.
La pression
exercée sur lui, même légère avec la pulpe de l'index, reproduit exactement
la douleur du patient, même si celle-ci lui paraissait plus profonde ou
diffuse ou plus externe, ou plus haute ou plus basse.
Sans doute la
pression très insistante, faite avec un index très ferme peut réveiller chez
le dorsalgique d'autres points douloureux à d'autres endroits, mais aucun
comme celui-ci ne rappelle au patient « sa douleur » habituelle et aucun
autre n'a cette constance et cette fixité.
2) Technique de recherche
Ce point doit
être recherché, le patient assis, tête fléchie, mains sur les genoux, en
position de relâchement complet. Le doigt de l'opérateur glisse lentement,
parallèlement à la ligne des épineuses à un travers de doigt de celles-ci.
Il est commode de se servir de l'index pour le côté gauche, du majeur pour
le côté droit, les doigts écartés en fourchette, glissant doucement sur la
peau. Tous les demi centimètres, l'opérateur exerce une pression légère (la
même à tous les étages et de chaque côté).
L'examen
attentif des plans cutanés à son niveau va les montrer souvent très
sensibles à la manoeuvre du pincer -rouler, sur une surface de quelques
centimètres carrés, ou parfois sur une longue bande de quelques centimètres
de hauteur se dirigeant obliquement en dehors et légèrement en haut (fig.
3).
L'anesthésie de
la peau ne fait pas disparaître le point et l'anesthésie profonde loco
dolenti, plan par plan, ne le supprime qu'imparfaitement, irrégulièrement et
d'une manière transitoire.
Ce « Point
interscapulovertébral » que l'on trouve dans 80 % des dorsalgies bénignes,
pose donc un problème qui nous paraît être une des clefs indispensables à
la compréhension du mécanisme des douleurs dorsales. On peut même dire que
sa présence individualise une forme très habituelle des dorsalgies, homogène
dans son tableau clinique, qu'il s'agisse d'une algie aiguë ou chronique : «
l'algie interscapulovertébrale » (Maigne, Le Corre).
L'objet de la
présente communication est une analyse critique de ce « Point
Interscapulovertébral ».
II) A quoi correspond ce point
interscapulo-vertébral ?
1) Est-il musculaire ?
Dans ses travaux
consacrés à la douleur issue des disques cervicaux, Cloward, reprenant
certaines expériences de Weddell, Feinstein, Pattle et de Frykolm, a montré
que l'excitation mécanique ou électrique de la partie antéro-latérale de
l'annulus des disques cervicaux inférieurs produit une douleur
interscapulaire. Il obtient une douleur identique, en excitant directement
la racine motrice des derniers étages cervicaux.
Fig. 3.
La branche postérieure du 2° nerf rachidien (d'après Hovelacque). Elle
devient superficielle en perforant les muscles paravertébraux dont
l'innervation est cervicale. Son point d"émergence superficielle correspond
au point inter scapulovertébral. Son territoire correspond à la zone
d'hyperesthésie et à celle de l'infiltration cellulalgique qui accompagnent
fréquemment la dorsalgie.
L’infiltration anesthésique faite à son niveau d'origine entre D2 et D3
soulage la dorsalgie et fait disparaître le point interscapulaire.
Cloward
cherchait, ce faisant, à expliquer l'irradiation interscapulaire dans les
hernies discales cervicales. Se basant sur des constatations
électromyographiques, il trouve que cette excitation détermine des
potentiels d'action anormaux dans les muscles fixateurs de l'omoplate. Il
s'agit donc pour lui d'une douleur musculaire de l'angulaire de l'omoplate
ou des rhomboïdes ; il l'explique par une irritation du nerf sinu-vertébral
qui se transmettrait par un réflexe segmentaire dans la moelle à la racine
motrice du même étage ou d'étage voisin et il reprend l'opinion de Frykolm
qui dit qu'une part de la douleur des névralgies d'origine mécanique
vertébrale est due à l'irritation de la racine motrice. Il est évidemment
essentiel d'admettre comme Cloward la possibilité de changement d'étage
puisque ces muscles (rhomboïdes et angulaire) sont innervés par les 3°, 4°,
et 5° racines cervicales alors que les névralgies cervico-brachiales sont le
fait des 6°, 7° ou 8° racines cervicales. Une première remarque doit être
faite : selon nos observations, la douleur dorsale est vraiment concentrée
en un point précis, situé au même niveau dorsal quel que soit l'étage
cervical atteint même si le patient la perçoit plus diffuse ou plus latérale.
Les quelques variations d'étages que nous avons rencontrées para D4
quelquefois, para D6 plus rarement, ne nous ont pas, semblé liées à des
différences d'étages du « Point sonnette cervical ».
a) Le
rhomboïde
Or si l'on admet
comme Cloward qu'il s'agit d'une douleur du rhomboïde, il faut se demander
pourquoi seule la partie la plus interne et la plus basse de l'insertion de
ce muscle sur la colonne vertébrale serait isolément douloureuse. De plus :
b) Le trapèze
Très fréquemment
ces dorsalgies bénignes sont rapportées à une souffrance ou à une
contracture du trapèze. Il est certain que ce muscle joue un rôle important
dans le maintien de la posture dans un travail tel que la couture ou la
dactylographie. Il est extenseur de la tête par ses fibres supérieures ; il
est fixateur de l'omoplate qu'il attire vers la ligne médiane par ses fibres
moyennes et enfin, par ses fibres inférieures, il tire sur l'omoplate et
oriente la glène vers le haut, élevant le moignon de l'épaule et permettant
l'élévation du bras. Mais la mise en contraction isométrique contre
résistance contrariée de chacune de ces portions du trapèze n'augmente pas
la sensibilité du point inter scapulovertébral, et on voit mal pourquoi ce
serait toujours les mêmes fibres moyennes qui seraient sensibles à leur
partie la plus interne. De plus, le trapèze est innervé par le nerf spinal,
nerf crânien, ce qui ne rend pas compte de la douleur interscapulaire des
névralgies cervicobrachiales.
c) Le
splénius et le complexus
Il est par
contre deux muscles dont l'innervation est bien cervicale, par les branches
postérieures des nerfs rachidiens, et dont l'insertion inférieure descend
exactement au niveau de D5 ou de D6 : ce sont le splénius et le complexus.
Le splénius est
un rotateur puissant de la tête et du cou. Il est l'antagoniste du
sterno-cléido-mastoïdien du même côté : dans une rotation de la tête à
gauche, c'est le sterno-cléido-mastoïdien droit qui se contracte en même
temps que le splénius gauche. Il s'insère de l'occiput aux épineuses des six
premières cervicales (splénius capiti) tandis que le splénius cervici va des
transverses des 2 e, 3 e et 4 e cervicales
aux épineuses des 2e, 3 e, 4 e et 5 e
dorsales.
Le grand
complexus va de l'occiput selon un trajet vertical aux apophyses transverses
des 5 dernières cervicales et des 5 premières dorsales. Il est extenseur
puissant du cou et de la tête ; il joue un rôle très important, plus que le
trapèze car plus puissant dans ses fibres supérieures, dans le maintien
postural de la tête fléchie. Son insertion inférieure sur D5 correspond
exactement au Point inter scapulovertébral. Mais là aussi, la mise en
contraction contrariée en extension (complexus) ou en rotation (splénius)
n'augmente que rarement la sensibilité du Point inter scapulovertébral.
d) Les
muscles paravertébraux
Leur innervation
est, on le sait, tributaire pour la région dorsale haute et même moyenne des
branches postérieures des nerfs cervicaux. Cette innervation décalée est
connue des anatomistes et aété aussi notée par les spécialistes de la
rééducation chez les paraplégiques. Dans un travail basé sur des recherches
électromyographiques chez des patients tétra ou paraplégiques, J. G. Gough
et J. H. Koepke notent qu'il peut y avoir des différences de 3 à 6 étages
entre l'origine du nerf et le myotome correspondant. Ce myotome est situé
plus bas que le dermatome correspondant.
Dans les
dorsalgies où l'on trouve un « Point sonnette cervical », il est habituel de
noter à la palpation attentive que les faisceaux de ces muscles
paravertébraux de la région médio-dorsale (D5-D6) sont durs, tendus, cordés
et très sensibles, alors qu'ils le sont peu ou pas du côté opposé.
L'examen
électromyographique de ces muscles fait au niveau du « Point inter
scapulovertébral » ne nous avait apporté jusqu'à présent aucun
renseignement. Mais reprenant ces examens avec Heuleu, nous avons pu dans
certains cas obtenir des potentiels à condition d'exercer une pression
simultanée sur le « Point sonnette cervical antérieur ». La souffrance de
ces muscles paravertébraux, médiodorsaux à innervation cervicale fournirait
une explication satisfaisante à ces dorsalgies d'origine cervicale.
Mais cela
n'explique pas la zone d'hyperesthésie cutanée ou la bande d'infiltration
cellulitique qui sont souvent présentes dans les dorsalgies chroniques et
qui s'étendent jusqu'à la partie externe du dos. Aussi faut il envisager une
autre hypothèse.
2) Correspond il au trajet d'un nerf superficiel ?
La première
hypothèse qui vient à l'esprit, et de loin la plus séduisante, serait que ce
soit le point d'émergence superficielle d'une branche postérieure d'un des
deux derniers nerfs cervicaux. Mais si l'on se rapporte aux travaux des
anatomistes, on voit qu'aucun d'eux n'attribue à ces nerfs un territoire
cutané aussi bas (il n'en va pas de même, nous venons de le voir, pour
l'innervation musculaire). Le plus bas, C8, se trouve à trois travers de
doigt au dessus du niveau habituel du « Point interscapulovertébral ».
Mais parmi les
branches postérieures des nerfs rachidiens, il en est une qui devient
superficielle exactement à l'endroit où nous trouvons le Point inter
scapulo-vertébral. C'est la branche postérieure du 2e nerf rachidien
qu'Hovelacque décrit comme plus importante que les autres et distribuant un
territoire cutané plus étendu puisqu'il va de la partie moyenne du dos
jusqu'à sa partie externe et remonte jusqu'à l'acromion (fig. 4).
Ce nerf naît
entre D2 et D3, contourne le massif articulaire postérieur avec lequel il
affecte des rapports intimes et passe dans un orifice ostéofibreux étroit :
le trou de conjugaison postérieur de Cruveilher limité en haut par
l'apophyse transverse de D1, en bas par le col de la côte sous-jacente et en
dehors par le ligament costo-transversaire supérieur. Puis il descend
verticalement dans la gouttière paravertébrale dans un plan profond. Il
donne deux rameaux, l'un externe musculaire qui va au long dorsal, l'autre
plus important, interne, musculo-cutané et qui donne des rameaux musculaires
au transversaire épineux et à l'interpineux. Ce rameau interne devient
superficiel au niveau de D5 ou D6, à 3 cm de la ligne médiane, c'est à dire
exactement à l'endroit ou nous trouvons toujours le Point inter
scapulovertébral. De là, il s'épanouit horizontalement, innervant un large
territoire cutané, beaucoup plus important que celui des autres nerfs
dorsaux, qui s'étend loin en dehors, atteignant l'acromion. Ce territoire
correspond à la zone d'hypersensibilité cutanée fréquemment rencontrée et à
la zone d'infiltration cellulitique. Au cours de son trajet le rameau
interne peut parfois donner quelques rameaux au rhomboïde ou au trapèze (Hovelacque,
Turner) et cela rend bien compte qu'il puisse y avoir quelquefois une
sensibilité de quelques faisceaux de ces muscles que l'on détecte par la
palpation associée à la mise en contraction isométrique contrariée.
Fig. 4.
Les nerfs superficiels du plan dorsal (d'après Hovelacque).
Pour vérifier
l'exactitude de cette hypothèse, nous avons pratiqué l'infiltration
anesthésique de cette branche postérieure de D2, au niveau de son émergence
entre D2 et D3 sur plus de quarante malades présentant soit une algie
interscapulaire aiguë (10 cas) soit une algie interscapulaire chronique (32
cas) à type de dorsalgie des couturières. Ces malades présentaient tous à
l'examen le même Point inter scapulovertébral net, précis, para D5,
épicentre de la dorsalgie. Dans tous les cas, et ceci était particulièrement
évident dans les dorsalgies aiguës, nous avons pu supprimer immédiatement la
douleur spontanée, et fait complètement disparaître la sensibilité du «
Point inter scapulovertébral ». La bande de « cellulite » devient alors
indolore à la manoeuvre du pincé-roulé, et l'hyperesthésie de la peau
disparaît.
Sur le plan
thérapeutique, cette infiltration eut un excellent résultat dans les algies
interscapulaires aiguës : 7 très bons soulagements durables sur 10 cas. Dans
les dorsalgies chroniques, son effet ne fut durable que dans quelques cas et
son intérêt thérapeutique nous est apparu moindre que dans les algies
aiguës, encore qu'elle puisse être un bon élément d'appoint. Nous devons
ajouter que dans 4 cas où l'infiltration de la branche postérieure du 2e
nerf rachidien n'apporta pas la disparition de la sensibilité du Point inter
scapulovertébral, c'est en infiltrant l'étage sus-jacent, soit la branche
postérieure du 1er nerf rachidien que nous avons obtenu le résultat
recherché.
Il est
évidemment difficile d'affirmer que l'anesthésie ainsi pratiquée n'intéresse
que la branche postérieure de D2. Elle peut intéresser certains muscles
paravertébraux dont l'innervation vient, comme nous l'avons vu, des
dernières racines cervicales. Cette hypothèse donnerait une solution simple
; mais elle n'explique pas ce « Point interscapulaire » si localisé, sa
fixité ni la bande cellulalgique des cas chroniques, ni l'hypersensibilité
cutanée locale si fréquente, notée par Louyot, Arlet et Toussaint et que
soulage très bien l'infiltration ainsi pratiquée.
Il est donc très
vraisemblable qu'il s'agit bien de la branche postérieure du 2e nerf
rachidien. Mais cela ne rend pas compte des très nombreux cas où la douleur
interscapulaire trouve son origine au niveau du rachis cervical, ce que
montre la manoeuvre du Point sonnette cervical présent dans 75 % des cas
d'algie interscapulovertébrale et ce que Cloward a démontré par ses
expériences. Et on se demande le lien qui peut exister entre les derniers
étages cervicaux et cette branche postérieure du 2e nerf rachidien.
Le nerf
sinu-vertébral, qui innerve les fibres superficielles de l'anulus, a un
trajet ascendant et innerve l'étage sus-jacent à son origine (Lazorthes).
Selon Tondury, ces nerfs présentent entre eux des anastomoses qui forment un
véritable réseau. Ce fait pourrait expliquer qu'il puisse innerver des
étages encore plus haut situés. Mais est il possible que, parti de D2, ce
nerf sinu-vertébral innerve le disque C6-C7 ?
Y aurait-il chez
l'homme des anastomoses entre les branches postérieures, des nerfs
rachidiens comme Stilwell en a trouvé chez le singe ? Seules des recherches
anatomiques poussées pourraient donner une réponse à cette question.
Il est également
très possible que ce nerf puisse être irrité ou comprimé lorsqu'il perfore
les muscles paravertébraux pour devenir superficiel, quand ceux ci,
d'innervation cervicale sont eux mêmes tendus et douloureux.
Notons enfin que
l'étage D2 est un étage très important pour le sympathique du cou et du
membre supérieur et que, comme nous l'avons remarqué, l'infiltration
stellaire coupe souvent complètement la douleur dorsale, ce qui est surtout
évident dans les cas aigus et alors la pression sur le Point sonnette ne
provoque plus la dorsalgie.
Telles sont les
questions que soulève l'existence de ce « Point interscapulovertébral » para
D5. Mais si l'on peut discuter sa nature, on ne peut discuter sa réalité et
son importance dans ce problème des dorsalgies bénignes.
III) Le rôle du terrain
L'importance du
terrain dans les dorsalgies bénignes a été soulignée par tous les auteurs.
Certains font même jouer à l'élément psychique un rôle non seulement
important mais exclusif. Il n'est pas douteux que de nombreux facteurs
endocriniens et surtout psychiques sont des éléments amplificateurs ou
révélateurs de ces états douloureux. Il existe certainement des algies
dorsales purement psychiques, mais le caractère de ces dernières semble bien
particulier : grande variabilité dans la topographie de la douleur d'un jour
à l'autre ; on est frappé par la multiplicité des points douloureux à la
pression ; tout y est hypersensible : les épineuses, la peau, les muscles
avec des variations considérables d'un examen à l'autre. Il n'y a aucun
signe localisé précis et fixe. Il n'y a pas de caractère unilatéral.
Si la plupart
des dorsalgies interscapulaires d'origine cervicale ont une origine
posturale ou traumatique, il est certain qu'un certain nombre d'entre elles
éclosent ou se manifestent surtout à l'occasion d'épisodes affectifs ou de
problèmes dans le travail. Dans 22 cas se présentant selon ce tableau, et où
notre thérapeutique physique habituelle se montrait peu efficace soit
qu'elle ait peu ou mal soulagé, soit qu'il s'agisse de cas avec récidives
fréquentes ou rapides, nous avons fait pratiquer un examen
électromyographique à la recherche de signes d'irritabilité neuromusculaire.
Cet examen conduit selon le protocole habituel avec les épreuves du garrot
et de l'hyperpnée par Aullas ou par Heuleu, a montré dans 17 cas sur 22
l'existence de signes électriques d'irritabilité neuromusculaire
habituellement rapportée à la spasmophilie. Certaines de ces patientes
avaient été dans le passé très soulagées par un traitement calcique,
institué d'ailleurs sous le prétexte d'une « décalcification ». Cette
constatation montre l'intérêt de la recherche de ces signes
d'hyperirritabilité neuromusculaire dans les dorsalgies habituelles, élément
qui se surajoute ou qui amplifie le facteur mécanique vertébral, cervical le
plus souvent responsable de la dorsalgie.
.
Bibliographie
1. Se rapporter
à la bibliographie de l'article précédemment publié : MAIGNE R. Sur
l'origine cervicale de certaines dorsalgies bénignes et rebelles de
l'adulte. Rev Rhum, 1964, 9, 497-503.
2.
CLOWARD R. A. The clinical significance of the sinuvertebral nerve of the
cervical spine in relation to the cervical disk syndrome.
1. Neurol
Neurosurg Psychiat 1960, 23, 321.
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7.
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levels in erector spinal muscles. Archiv. Phys. Med. and Rebab., 1966, 47,
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