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LES MANIPULATIONS COSTALES : TECHNIQUE

 

Georges BERLINSON

21 000 DIJON

 

 

 

La côte fait partie d'une chaîne articulaire complexe dont toutes les pièces sont interdépendantes. Rappelons que la vertèbre thoracique comporte douze articulations. C'est dire que lorsqu'il existe une douleur costale, il faut traiter le segment rachidien correspondant, dans un premier temps, et, seulement s'il persiste encore une douleur costale, traiter la côte elle même (Fryette).

Nous n'envisagerons dans cet exposé que l'étude des côtes sternales, c'est à dire en liaison avec le sternum, à l'exclusion des côtes asternales (fausses côtes) et de la première côte, qui feront l'objet d'une étude particulière.

 

 

RAPPEL BIOMECANIQUE

 

Les côtes moyennes se portent en dehors et en avant en inspiration et en dedans et en arrière en expiration. L'axe joignant une costo-vertébrale à une costo-transversaire se sagittalise au fur et à mesure que les côtes sont plus basses.

De plus, la côte se "vrille" sur elle­même, ce qui fait qu'en expiration, le bord supérieur est "proéminent" alors qu'en inspiration, c'est le bord inférieur qui le devient.

 

 

EXAMEN CLINIQUE

 

Après avoir examiné le segment rachidien correspondant à la côte douloureuse (attention, la costo-transversaire est beaucoup plus haute que la convexité costale correspondante) et l'avoir éventuellement traité, on examine la côte elle même :

 

Palpation

La palpation en décubitus ventral peut révéler une côte plus saillante que ses homologues. Le patient est ensuite allongé en décubitus latéral, sur le côté non douloureux, le thorax soulevé par un coussin ou le genou. Dans cette position, on apprécie le jeu relatif de cette côte qui peut être diminué par rapport à la côte sus et sous jacente. Pour ce faire, l'index et le médius se placent dans l'espace intercostal sus et sous jacent.

 

Mobilisation

Dans un troisième temps, le malade est assis. L'examinateur va mobiliser la côte dans diverses directions pour savoir quelle est la direction douloureuse. Cette mobilisation peut se faire par action directe sur la côte ou indirectement par l'intermédiaire du rachis thoracique.

 

Les trois manœuvres  de mobilisation directe sont :

- La pression directe d'arrière en avant sur l'arc postérieur.

- La pression de haut en bas sur le bord supérieur de l'arc moyen.

- La pression directe de bas en haut sur le bord inférieur de l'arc moyen, les doigts en crochet.

 

Ces deux dernières manœuvres, décrites par Maigne, sont surtout applicables aux côtes flottantes.

 

Les deux manœuvres de mobilisation indirecte sont :

‑ La latéro‑flexion dorsale contro­latérale qui ouvre le thorax et porte la côte en avant, donc en inspiration.

‑ La latéro‑flexion dorsale homo­latérale qui ferme le thorax et porte la côte en arrière, donc en expiration.

 

Exemple clinique

Un patient se plaint d'une douleur thoracique en expiration au niveau du 6ème arc costal gauche.

Après avoir pratiqué les examens habituels, radiographiques et biolo­giques, on envisage une thérapeutique manipulative. La latéro-flexion gauche est douloureuse, alors que la droite est libre.

 

Après avoir réalisé un examen segmentaire rachidien en T6-T7, la palpation révèle une "saillie" au niveau du col de la 6ème côte gauche et l'examen en décubitus latéral confirme une restriction de la mobilité relative de cette côte par rapport à la côte sus et sous jacente.

 

 

LES MANIPULATIONS COSTALES EN ANTEPULSION

 

On distingue deux types de manipulations costales : les manipulations en antépulsion et celles en rétropulsion.

 

I) MANIPULATION EN DÉCUBITUS DORSAL

 

Mise en position : Localisation de la 6ème côte gauche. L'éminence thénar du médecin vient sur le col de la 6ème côte gauche (4 travers de doigts en dehors de la ligne médiane à ce niveau). Le bord externe du radius épouse la courbure costale. Latéro-flexion droite du patient en maintenant la cyphose et le niveau (fig 4).

 

 

Mise en tension par verrouillage des différents paramètres sans faire varier le niveau (fig 4bis).

 

Manipulation en fin d'inspiration par transfert du poids du corps avec une impulsion sèche et peu puissante qui imprime une pulsion postéro-antérieure ainsi qu'une traction par le truchement de l'avant bras du médecin qui attire la côte en avant et en dehors.

 

II) MANIPULATION EN POSITION ASSISE (fig. 5)

 

 

Contrôle scapulaire entraînant une latéro-flexion gauche du sujet.

Localisation et mise en tension comme ci dessus. Pulsion sur le col de la côte en avant et en dehors par le 5ème rayon épousant la côte, en fin d'inspiration, par transfert du poids du corps du médecin sur son pied gauche.

 

III) MANIPULATION EN ANTÉPULSION EN POSITION ASSISE. VARIANTE AVEC LE GENOU (fig. 6).

 

 

La technique est tout à fait superposable à la précédente. Le positionnement du patient est identique, de même que la localisation qui sera effectuée plus aisément avec la main. Puis, le médecin appliquera la face médiale de son genou sur la côte sans varier la localisation et exercera une pulsion en avant, sèche et rapide du genou sur la côte en fin d'inspiration. Dans certains cas, le confort pourra être augmenté par l'adjonction d'un petit coussin sur le genou.

 

IV) TECHNIQUE EN DÉCUBITUS VENTRAL. ANTÉPULSION DE LA 6ème COTE DROITE (fig. 7).

 

Ces techniques demandent une grande expérience car, comme toutes les techniques en "recoil", le dosage de l'impulsion manipulative doit être parfait sous peine de léser les structures sous jacentes et plus particulièrement dans le cas précis, le plastron chondro‑sternal qui est très fragile. Il n'est pas question d'écraser le patient. Il est impératif que le praticien travaille bras tendus. Pour cela, il manipulera sur une table mobile en position basse, ou à genoux sur une table

 

Décrivons maintenant la technique. Nous allons traiter la 6ème côte droite en antépulsion.

 

Mise en position : Le sujet est en décubitus ventral. On le positionne en légère latéro-flexion droite pour "ouvrir" l'hémithorax droit. La main droite de l'opérateur vient en contre appui sur la transverse gauche du niveau sus jacent (T5). Le pisiforme gauche sur le bord inférieur (saillant) de la 6ème côte droite au niveau de son col (convexité costale en dehors de la masse des muscles spinaux).

 

Mise en tension par "torque" des deux mains. Le torque est une rotation de la main en pronation soit vers le radius soit vers le cubitus, qui a pour effet d'éliminer l'inertie des parties molles et de réaliser ainsi une première mise en tension.

 

Manipulation par pulsion en haut et en avant en fin d'inspiration. La pulsion sera obtenue par une contraction sèche des pectoraux du praticien qui amènera une amplitude verticale très faible de l'ordre du 1/2 cm.

 

V) TECHNIQUE DÉCRITE PAR R. MAIGNE (fig. 8).

 

 

Patient assis à cheval. L'opérateur est debout derrière le patient.

 

On teste la côte : si la pression est douloureuse vers le bas, la pulsion s'exercera avec l'index qui accroche le bord inférieur de la côte, vers le haut, le pouce en contre pression sur le bord supérieur de l'extrémité spinale de la côte. Est ainsi réalisé un bras de levier et la manipulation sera effectuée en fin d'inspiration. Si la pression est douloureuse vers le haut, l'index sur le bord supérieur de la côte exercera une poussée vers le bas, le pouce étant accroché sur le bord inférieur de l'extrémité costale. La manœuvre sera effectuée en fin d’expiration.

 

 

CAUSES D'INSUCCES DANS LES MANIPULATIONS EN ANTEPULSION

 

1) Mauvaise localisation

 

La pulsion doit se faire sur le col de la côte, c'est à dire dans la partie postérieure de sa convexité en dehors de la masse des muscles spinaux.

 

Lors de la mise en tension, le verrouillage doit persister afin de ne pas risquer de faire une manipulation lombaire (ou autre !!) lors de la pulsion manipulative.

 

2) Temps respiratoire

La pulsion se fait en fin d'inspiration, juste avant le temps expiratoire lorsque la côte est en butée avant maximale.

 

3) La pulsion est sèche, rapide et de faible intensité. Nous sommes dans le cadre des techniques dites de "High velocity, low amplitude".

 

 

MANIPULATIONS EN RETROPULSION

 

Les manipulations en rétropulsion sont utilisées lorsque la douleur naît en inspiration, ou lorsqu'elle est augmentée par la latéro-flexion opposée (ouvrant le thorax du côté douloureux). Il faut alors repousser la côte en arrière en fin d'expiration.

 

Les côtes forment une chaîne articulaire rigidifiée en arrière par les articulations costo-rachidiennes et en avant par le sternum. Toute action sur cette chaîne retentit sur l'ensemble de ses composants. Donc, une action en antépulsion sur une côte droite va entraîner une contrainte en rétropulsion sur la côte homologue controlatérale.

 

Si la 6ème côte gauche est douloureuse en inspiration, une antépulsion sur la 6ème côte droite en antépulsion réalisera une rétropulsion de cette 6ème côte gauche.

 

I) MANIPULATION EN DÉCUBITUS DORSAL (fig. 9 et 9 bis)

 

 

 

On se propose de réaliser une rétro­pulsion de la 6ème côte gauche.

Sujet en décubitus dorsal. L'opérateur est à droite du sujet. On localise la 6ème côte droite, puis ouverture du thorax droit par latéro-flexion gauche du patient. La main gauche du médecin vient placer l'éminence thénar sur le col de la côte droite et la pulsion se fera en fin d'inspiration, comme dans la technique décrite précédemment. Notons que le médecin peut très bien se placer d'un côté ou de l'autre du sujet, l'essentiel étant de respecter le niveau et l'ouverture du thorax du côté de la côte à antépulser.

 

II) TECHNIQUE DE MAIGNE (fig. 10)

 

 

 

Comme nous l'avons vu, la pulsion de haut en bas sur le bord supérieur de la côte, le pouce faisant levier, réalise une rétropulsion de la côte en position assise ou debout.

Cette technique utilise le fait que la côte se vrillant, le bord supérieur et le bord inférieur saillent successive­ment en expiration et en inspiration

 

III) RÉTROPULSION COSTALE SUR LE SUJET ASSIS (fig. 11, 12, 13)

 

Cette technique m'a été récem­ment enseignée par mon ami le Dr L. Kruhmholz (Directeur d'Enseignement du Groupe de l'Ouest).

 

 

Position du patient

Le sujet est assis, détendu. Il laisse reposer sa tête sur l'épaule du médecin.

L'éminence thénar de ce dernier vient sur la côte à traiter, en dehors de la jonction chondro‑costale, l'autre main passant au dessus de l'épaule du sujet vient renforcer la première. Le médecin réalise un appui postérieur par appui pectoral sur l'hémithorax opposé à la côte afin de créer un vide postérieur pour celle ci. Au départ, le médecin, derrière le sujet, a les genoux pliés.

 

Réalisation de la manipulation

Le médecin en se redressant réalise une cyphose progressive du patient. Lorsqu'il sent la localisation costale sous sa main, il effectue une légère latéro-flexion du côté de la côte à traiter et en conservant bien le niveau, il effectue une pulsion en arrière et en haut en fin d'expiration. Cette technique est très élé­gante et nécessite un jeu corporel parfait de la part du manipulateur.

 

IV) LA RÉTROPULSION COSTALE EN DÉCUBITUS DORSAL

 

Elle semble réalisable en théorie, mais elle doit être absolument évitée, car elle est dangereuse pour le plastron chondro-costal.

 

 

EN CONCLUSION, DEUX NOTIONS ESSENTIELLES

 

La pulsion se fait sur le col de la côte, c'est à dire la convexité osseuse à la limite du bord externe des muscles spinaux, Ce repère osseux est de plus en plus externe au fur et à mesure que l'on étudie les côtes plus basses.

Cette pulsion peut également s'effectuer sur le bord inférieur ou le bord supérieur selon les cas. La pulsion manipulative est donnée par le transfert du poids du corps et non par la main. Celle ci n'est que le prolongement du corps du médecin d'où l'importance du jeu corporel. ON NE MANIPULE PAS AVEC LES MAINS.



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