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Les manipulations de l'épaule

Yvon Lesage

 

 

Les divers composants de la ceinture scapulaire ont une action complexe et complémentaire permettant tous les mouvements de l'épaule. L'articulation omo-humérale se charge de la plus grande partie du travail, mais l'omothoracique et les articulations acromio et sternoclaviculaires ont une importance que l'on a eu le tort de longtemps ignorer ou négliger. Si elles sont complémentaires, elles sont aussi interdépendantes. L'atteinte de l'une se répercute obligatoirement sur les autres. Il n'est pas inutile non plus d'insister aussi sur le rôle physiologique et pathologique important des complexes capsulo-ligamentaires et surtout musculotendineux abarticulaires.

Toutes nos manipulations périphériques s'accompagnent toujours d'une mobilisation des articulations sus- et sous-jacentes à l'articulation en cause. Ceci est encore plus évident pour l'épaule où nous n'aborderons la manipulation spécifique qu'après avoir mobilisé tout le complexe périphérique.


Articulation omo-thoracique

Première technique : bras en adduction

Elle peut être utilisée même lorsqu'il existe une très importante capsulite rétractile. Le patient est allongé sur le côté présumé sain, la jambe inférieure repliée et fléchie, la jambe supérieure allongée. Cette position permet d'obtenir une bonne stabilité. Le bras opposé est allongé le long du corps ou replié en avant sur la table.

Le manipulateur vient se placer devant le sujet, son abdomen contre le thorax du patient (fig.1). L'un des bras passe par dessus l'épaule douloureuse et saisit le bord interne de l'omoplate. L'autre bras glisse sous le bras du sujet, les deux saignées du coude en contact et la main empaume l'angle inférieur de l'omoplate (fig.2).

Uri mouvement de circumduction lent d'abord, puis progressivement un peu plus rapide, mais surtout beaucoup plus souple, permet de mobiliser l'omoplate sur le thorax. Ce mouvement s'exécute tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, jusqu'à obtention d'un bon assouplissement (fig.3).

Fig. 1
Fig. 2
Fig. 3

 

 

Deuxième technique : bras en abduction

Lorsque le bras peut être mis en abduction et même simplement quand il existe une bonne élévation antérieure, le manipulateur transfère, sans changer sa propre position, le bras demi-replié du patient sur son bras supérieur. Les appuis des mains restent identiques (fig.4).
Dans un premier temps, la main inférieure bascule l'angle de l'omoplate vers la table (fig.5).
Dans un deuxième temps, le flanc vient prendre appui sur le bord interne du bras, l'obligeant dans un mouvement très doux mais très progressif et très appuyé à faire basculer l'angle de l'omoplate en haut et en avant. Ce mouvement doit toujours s'exécuter à la limite de résistance. Il permet aussi bien souvent de lever quelques adhérences capsulaires résiduelles.

Fig. 4 et 5
 
Troisième technique : le pilon

Ce mouvement fait suite au précédent, quand il est possible d'élever le bras à angle droit, coude replié (fig.6). Une main vient se placer en dessous, dans la saignée du bras replié ; l'autre se place au-dessus de l'olécrane, la main du sujet pendant en avant ou en arrière. Un mouvement de pilon de haut en bas et de bas en haut est exécuté avec de plus en plus d'ampleur. Suivant les possibilités de mobilisation, l'avant-bras du patient est placé soit vers le bas (fig.7), soit, si cela est possible, vers le haut (fig.6). Quand cela est possible, il est souhaitable de modifier l'orientation du bras afin de changer les rapports de l'articulation. Le dernier mouvement doit être encore plus ample, et d'un geste sec vers le haut, doit décoller les surfaces articulaires.

Cette troisième technique déborde bien entendu le cadre de l'omo-thoracique pour aborder l'épaule proprement dite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Articulation gléno-humérale

Les trois techniques qui vont suivre intéressent principalement la gléno-humérale mais aussi, à un certain degré, l'articulation acromio-claviculaire. L'utilisation de l'une ou de l'autre est conditionnée par l'examen clinique suivant le principe du mouvement contraire au mouvement douloureux (sens de la non-douleur).

Première technique

Cette première technique est passe-partout et utilisable même sur une épaule gelée. Elle a essentiellement pour but de décoller les surfaces articulaires.

Le sujet est assis sur un tabouret bas, les deux bras le long du corps, coude fléchi du côté atteint. Le manipulateur se place sur le côté du patient perpendiculaire à celui, les pieds bien écartés, genoux fléchis. Il glisse son bras sous l'aisselle (en pleine sueur) légèrement replié, la main tournée vers le haut reçoit la paume de l'autre main (fig.8). Le coude du patient est plié à angle droit et l'avant -bras repose, détendu, sur l'arceau formé par les bras du manipulateur. Le coude lui-même est maintenu collé au corps par le pli inguinal du manipulateur (ceci est très important : point pivot).

Une légère flexion sur les jambes lui permet d'obtenir la mise en tension. Dans un mouvement sec, il se relève en n'oubliant pas de porter légèrement son bassin en avant, ce qui permet de mettre le bras en adduction forcée, et combiné avec l'appui de tout le bras dans l'aisselle provoque une ouverture puissante, mais absolument pas brutale de l'articulation omo-humérale (fig.9).

Fig. 8 et 9  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette technique est à utiliser lorsque l'élévation du bras est possible (signe du peigne négatif), et lorsque la rétropulsion est douloureuse ou impossible (signe du soutien-gorge positif).

Le sujet est toujours assis sur un tabouret bas, bras à angle droit, avant-bras à la verticale vers le haut, paume en avant, main ouverte. Le manipulateur se place latéralement derrière le bras et non derrière le dos, une main en contre-appui derrière l'épaule, lé coude reposant sur l'abdomen du manipulateur (fig.10). L'autre main se pose ouverte sur la main ouverte du patient. Une pression contrariée des deux bras obtient la mise en tension, un mouvement bref et sec la manipulation (fig.11). Cette manipulation intéresse essentiellement l'omo-humérale et l'acronnio-claviculaire.

Fig. 10 et 11

 

 

Troisième technique

Celle-ci est à utiliser à l'inverse de la précédente lorsque la rétropulsion est libre, mais lorsque le sujet est incapable de placer la main sur la tête, (signe du peigne positif).

Le sujet est toujours assis sur le tabouret, l'avant-bras replié derrière le dos, le bras collé au corps. Ce dernier point est très important car dans le cas contraire, il serait possible de provoquer une rupture de la coiffe des rotateurs. Le manipulateur se place derrière le sujet, le coude toujours dans l'aine. La main du même côté se place en contre-appui devant l'épaule, l'autre main ou tout au moins les doigts très légèrement fléchis, viennent se placer derrière le poignet (fig.12). Le mouvement manipulatif consiste à refermer simplement la main, ce qui, compte tenu du coude pivot, donne à l'avant-bras un léger mouvement vers l'arrière (un peu comme dans un armloch) (fig.13).

Cette manipulation très puissante doit être contrôlée et le mouvement, exécuté du bout des doigts, très souple et très limité (fig.14). Elle intéresse à la fois l'orno-humérale et l'acromioclaviculaire.

Fig. 12
Fig. 13
Fig. 14

 


Acromio-claviculaire

Première technique

La manipulation élective de cette articulation se fait de la façon suivante. Le sujet est toujours assis sur un tabouret, la main sur la hanche, pouce en avant. Ce sera le point pivot (fig.15). Le manipulateur vient placer son flanc contre la région lombaire du sujet. Son creux axillaire épouse l'épaule saine du sujet (oontre-appui). Les jambes bien fléchies (comme dans une entrée de mouvement de hanche en judo) (fig.16), le bras opposé vient reposer sur la clavicule opposée, l'autre main vient saisir la masse de l'épaule à manipuler ; l'avant-bras repose par son bord interne sur la face postéro-externe des bras du sujet. La manipulation consiste en un fléchissement brusque des deux iambes, S'accompagnant d'un léger mouvement du coude, rapprochant le bras du corps (fig.17).

Fig. 15
Fig. 16
Fig. 17

 

Deuxième technique

L'opérateur se place sur le côté du patient, le bras de celui-ci reposant sur son épaule, avantbras dressé vers le haut ; les deux mains jointes prennent appui sur l'extrémité externe de la clavicule (fig.18). Une pression rapide est exercée en même temps qu'il est demandé un abaissement brusque de l'avant-bras (cliché19).

Fig. 18
Fig. 19

 


Sterno-claviculaire

Il est difficile de manipuler une seule sternoclaviculaire. Il est plus simple de solliciter conjointement les deux articulations. Le sujet est assis sur le même tabouret. Les deux bras sont à demi fléchis, mains sur les hanches, pouces en avant (points pivots) (fig.18). Le manipulateur se place derrière, ventre et thorax épousant étroitement le dos du sujet, jambes fléchies. La face interne des avant-bras repose sur la face postéro-externe des bras du sujet (fig.19). Ses deux mains ouvertes, pouces bien écartés, le bord externe de l'avant-bras et du pouce viennent englober les deux épaules. Le mouvement manipulatif est un peu plus complexe. Il comprend une flexion des jambes, qui assure la mise en tension, une poussée en avant du thorax, qui assure la mise en tension et un étirement postéro-externe du bras, s'accompagnant d'un appui des avant-bras sur les bras.
 

Fig. 18
Fig. 19



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