Compte Rendu Association des Anatomistes, Mars 1956, Lisbonne
L'innervation
des articulations interapophysaires vertébrales
Par G. Lazorthes et J.
Gaubert |
Cette étude nous
a été inspirée par deux considérations. La première est que l’innervation des
articulations interapophysaires vertébrales est mal connue et même ignorée de la
plupart des auteurs, la deuxième qu'elle peut être l'origine des douleurs qui
accompagnent les arthroses vertébrales.
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L'innervation des articulaires postérieures a été étudiée sur six
rachis cervicaux
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Elle est
particulièrement abondante.
L'articulation
atloïdo-occipitale.
A l'inverse des autres, elle reçoit ses filets nerveux de la branche antérieure
du nerf rachidien et non de la branche postérieure. Ce nerf est plaqué sur
l'articulation par l’artère vertébrale et le ligament occipito-atloidien latéral.
Les rameaux articulaires sont aisément trouvés, brefs, sensiblement verticaux et
ascendants. Certains, postérieurs, se détachent dans la gouttière de l'artère
vertébrale, passent au?dessous puis en avant de l'artère, certains latéraux, les
plus nombreux, se détachent lorsque 1e nerf abandonne l'artère en regard de sa
boucle, d'autres antérieurs, rares et inconstants, pénètrent en regard du bord
externe du muscle long du cou.
L'articulation
atloïdo-axoïdienne.
L'innervation
présente une disposition transitionnelle entre celle de l'articulation
précédente et les autres. La capsule reçoit en effet des deux branches
antérieure et postérieure du nerf rachidien. La branche antérieure du 2° nerf
rachidien fournit à la face latérale de l’articulation trois rameaux en moyenne,
très courts, horizontaux, qui se détachent en deçà et au delà de son croisement
avec l'artère vertébrale. La branche postérieure fournit plus de rameaux
articulaires. Certains naissent directement de son tronc, d'autres plus nombreux
et plus volumineux de l'anastomose de C2 et C3. Ils se détachent latéralement
sur la saillie du massif articulaire.
Les autres
articulations cervicales.
L'innervation des articulations cervicales interapophysaires procède de trois
sources: du tronc du nerf, de la branche postérieure et du nerf vertébral.
Dans le fond du
canal de conjugaison avant le croisement du nerf cervical et de l'artère
vertébral qu'il faut enlever pour l'apercevoir, naît du nerf lui-même un rameau
assez volumineux et constant dirigé en arrière et en haut, qui généralement se
ramifie en deux à trois branches qui se dirigent vers la partie antérieure et
interne du plan articulaire.
Au milieu du canal de conjugaison, l'articulation reçoit un apport végétatif
direct. Pour l'apercevoir, il faut réséquer la racine antérieure de la
transverse, enlever l'artère et la veine vertébrales. C'est la branche
postérieure du nerf vertébral ou nerf vertébral postérieur qui fournit au plan
articulaire quatre rameaux en moyenne, certains dirigés en dehors, d'autres en
dedans. Les rameaux internes paraissent les plus gros, ils sont légèrement
ascendants. On voit leurs orifices de pénétration sur le plan capsulaire.
A la sortie du canal de conjugaison, la branche postérieure abandonne la
gouttière transversaire et se dirige vers l’arrière. Elle se détache presque à
angle droit de la branche antérieure, chemine dans une gouttière osseuse,
ménagée sur le col de l’apophyse articulaire supérieure de la vertèbre et y est
plaquée juste au dessous de la saillie maxima des articulaires par un plan
fibro-musculaire constitué par les scalènes, le muscle inter-transversaire et le
transversaire épineux. Elle émet des rameaux articulaires (quatre en moyenne)
latéraux et postérieurs, la plupart ascendants vers l'articulation
interapophysaire sus-jacente, de très rares descendants vers l'articulation
sous-jacente.
C'est au niveau
du rachis cervical que les rapports entre le plan osseux, et la branche
postérieure du nerf rachidien sont les plus intimes. Sur une pièce existait une
très volumineuse arthrose interarticulaire. Le nerf non englobé, était laminé,
étiré, abaissé sur un massif articulaire exagérément volumineux. Cette
constatation éclaire nettement notre compréhension des douleurs postérieures qui
accompagnent les arthroses cervicales.
On doit de plus
constater que c'est au niveau du rachis cervical qui est le plus mobile que
l'innervation est la plus riche.
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L'innervation des articulations interapophysaires a été étudiée sur
quatre rachis
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Les nerfs des
articulations interapophysaires viennent toujours de la branche postérieure du
nerf rachidien et naissent dès sa sortie du trou de conjugaison. La plupart sont
antérieurs. un seul gagne le plan postérieur. Ils sont peu nombreux, 3 à 4,
difficiles à mettre en évidence car très ténus. La faible innervation est peut
être en relation avec le peu de mobilité du rachis dorsal. La branche
postérieure est contre le plan osseux. Le rapport est intime puisque la limite
interne de l'orifice de Cruveilhier est constituée par le col clé l'apophyse
articulaire supérieure qui lui ménage une gouttière.
On peut dans ce
rapport étroit du nerf voir l'origine des dorsalgies.
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L'innervation des articulations interapophysaires lombaire a été
étudiée sur cinq rachis
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Les nerfs
naissent de la branche postérieure du nerf rachidien juste après la traversée de
l’aponévrose du transverse et sa pénétration dans la loge postérieure. Ses
rapports avec le plan osseux lie sont pas intimes, elle est entourée d'un
important tissu cellulo-graisseux. Parfois pourtant des trousseaux fibreux
plaquent le nerf sur le plan osseux du col de l'apophyse articulaire inférieure.
On peut compter
en moyenne six rameaux articulaires, ils se portent vers les articulaires
supérieure et inférieure. Les rameaux ascendants sont les moins nombreux; ils
gagnent la capsule articulaire en se dirigeant en haut et en arrière. Les
rameaux descendants sont plus nombreux (4 à 5 en moyenne), plus volumineux et
plus longs. Certains verticaux vont à l'interligne articulaire, d'autres
obliques abordent la partie inférieure de la capsule en passant sur sa face
externe. L'innervation de la charnière lombo?sacrée n’a rien de particulier; les
rameaux paraissent moins nombreux et plus grêles.
Au niveau des
rachis dorsal et lombaire, ni la chaîne du sympathique, ni les nerfs
sinu-vertébraux ne donnent des nerfs aux articulations interapophysaires.
Luschka décrit des branches nées de la racine sympathique et qui se dirigent
vers les arcs vertébraux et les diverses apophyses sans préciser davantage.
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Au
niveau du sacrum (quatre dissections)
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On ne peut parler
de rameaux articulaires vrais mais périostiques. Il existe cependant et
seulement pour les première et deuxième pièces sacrées un filet très grêle qui,
né à l'intérieur du canal sacré postérieur, descend par un bref trajet vers le
tubercule sacré postéro-interne et va vite pénétrer dans le périoste. Nous
n'avons rien trouvé de semblable pour la 3°, la 4° paires sacrées ainsi que pour
le nerf coccygien.
Si l'étude
anatomique précédente ne paraît, à notre connaissance, avoir jamais été faite,
par contre plusieurs travaux microscopiques ont été réalisés sur l'innervation
des capsules des articulations interapophysaires. VALENTIN (1843), RUDINGER
(1866) et surtout LUSCHKA décrivent une riche innervation à la fois
cérébro-spinale et végétative (rameaux vaso-moteurs). Ils décrivent des
corpuscules de Vater Paccini dans la capsule et dans la synoviale (KÖLLIKER,
1858; KRAUSE); ce dernier fait est d'ailleurs discuté par FICK et PAYR.
GOTTFRIED KELLER constate en 1953, dans son étude sur l'arthrose
interapophysaire, la distribution et la disparition de ces rameaux au niveau du
bourrelet arthrosique.
Les articulations
interapophysaires sont richement innervées, surtout au niveau des rachis
cervical et lombaire. La branche postérieure des nerfs rachidiens est très au
contact du plan articulaire interapophysaire. Elle représente par ses
territoires cutanés, musculaires et articulaires (ce dernier généralement
ignoré) un système anatomo-fonctionnel capable de donner l'explication de
contractures et d'algies para-vertébrales qui surviennent lors des arthroses
vertébrales interapophysaires.
Laboratoire de la Chaire d'Anatomie de Toulouse. Professeur G. LAZORTHES.
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